Collectif de professeurs des collèges de Briançon
Informations à destination des parents des élèves de CM2, 6èmes et les autres…
Suite au décret pour la mise en place des « groupes » en 6ème et 5ème dès septembre 2024 et sur tous les niveaux en 2025, nous, professeurs de collège, souhaitons vous faire part de nos inquiétudes et de notre désarroi.
En dehors du fait que les groupes homogènes ne permettent pas de faire progresser les élèves, nous ne mettons aucun sens derrière ces mesures.
Voici les conséquences pour nos élèves, pour vos enfants :
- Une répartition absurde et arbitraire : même si les professeurs font preuve de bonne volonté et s’appuient sur les évaluations de début d’année, l’affectation des élèves dans ces groupes n’aura aucun sens. On ne peut plus parler d’EGALITE des apprentissages. Les compétences des élèves sont très variées et inégalement maîtrisées. En français par exemple, un enfant peut être très pertinent à l’oral mais avoir de grandes difficultés à l’écrit. Et dans quel groupe mettre un élève mutique mais excellent à l’écrit ?
- Des conséquences psychologiques : malgré les précautions qui seront prises par les enseignants, comment l’élève va-t-il vivre le fait de se retrouver dans tel ou tel groupe ? Pendant l’adolescence, l’adulte est en construction : les groupes de niveaux représentent un choc bien violent, avec une intensification du sentiment d’injustice, de stigmatisation, de colère… Quels adultes préparons-nous ?
- Moins d’émulation et d’entraide : l’émulation nait de la différence. Être avec des camarades qui ne nous ressemblent pas est une richesse. Les élèves apprennent de leurs camarades davantage que de leurs professeurs. L’entraide est une des valeurs essentielles de l’école de la république : les élèves, « bons ou mauvais », tirent tous des bienfaits d’aider ou d’être aidés. Les binômes par exemple sont une vraie richesse. C’est l’apprentissage de la FRATERNITE qui s’y joue !
- Des effectifs chargés : Le mot « groupe » est biaisé : aucun moyen ne sera alloué pour que les enfants soient moins nombreux dans chaque groupe. Ce seront donc des classes de niveau parfois à 30 élèves.
- Un manque de stabilité : les élèves de 6ème notamment ont besoin de stabilité et de repères dans le groupe classe pour leur bien-être et pour assimiler correctement lesnotions enseignées. Avec ces groupes, ils vont devoir changer d’emploi du temps, changer de camarades, changer d’enseignants et donc changer d’habitudes de travail.
Voici les conséquences pour les enseignements :
- Méconnaissance des élèves : nous ne verrons que très ponctuellement certains élèves. Nous ne pourrons pas facilement les suivre et construire une relation stable et éclairée. Sur le papier, les professeurs de français et de maths pourraient être professeur principal mais comment assurer le suivi d’élèves inconnus ?
- Mise à mal des libertés pédagogiques : chaque enseignant devra avancer à la même vitesse sur les mêmes leçons en même temps et ne pourra plus approfondir les notions dont ses élèves ont besoin. En français par exemple, nous ne serons plus libres de travailler tel point du programme en œuvre intégrale ou en groupements de textes.
- Disparition de la « mémoire » de la classe : nous ne pourrons plus faire référence à ce que nous avons travaillé précédemment et à ce que nous verrons ultérieurement. Il ne sera plus possible de construire, à l’improviste, une notion au gré d’un texte étudié.
- Fin des projets d’année : avec des groupes changeants, les professeurs ne pourront plus imaginer de projets porteurs construits sur l’année entière, avec des intervenants extérieurs et des interventions régulières.