A Mesdames et Messieurs les représentants du CDEN des Hautes Alpes.
Ce comité n’est pas sociologique, il est politique. Si l’ordre du jour concerne les écoles des Hautes Alpes, présentées comme chaque année sous forme de tableaux chiffrés, nous, sud éducation 05, alarmons au préalable sur la situation actuelle globale. Nous devons faire face à un gouvernement qui inflige aux écoles une politique d’ austérité et de tri social par ledit « choc des savoirs » et par la réforme à marche forcée des lycées professionnels. Une politique qui laisse présager en suspens des suppressions de postes et qui punit le corps enseignant par l’instauration de 3 jours de carence. Une politique qui fragilise tout le système scolaire.
Qu’ allons nous faire des chiffres et des tableaux pour l’école ? Une analyse ? Qu’avons nous à faire, par exemple, d’indicateurs tels que la baisse des effectifs des élèves de notre département ? Les chiffres ne retranchent ni n’apportent à notre réflexion commune. Il sont un simple instrument du pouvoir. Sans eux, nous sommes en capacité de critiquer le système qui encadre et façonne notre expérience. Chacun dispose de sens logique pour observer et comprendre le système éducatif actuel, et chacun peut aspirer à une organisation morale, écologique et humaine qui prévaut à tout enseignement. C’est pour cela qu’une enquête sociale a été déposée au niveau national par l’intersyndicale.
Phagocyter toute forme de réflexion philosophique, couper tout développement imaginatif par le seul instrument des chiffres est le choix politique du capitalisme. Tant d’autres critères qualitatifs peuvent être choisis pour l’école :
Par exemple :
- Premier critère : le bien être et le vivre ensemble pour les élèves, pour leur famille et pour les agents, avec des encadrements humains conséquents, diversifiés et professionnalisés.
- Deuxième critère : la curiosité et le plaisir d’apprendre, avec le renouvellement d’un matériel spécifique autre que le tout numérique, avec la rénovation conséquente de la plupart des locaux vétustes qui viserait à les adapter au changement climatique et aux aspirations d’une jeunesse en quête de sens. La végétalisation de toutes les cours d’écoles serait un minima...
- Troisième critère : le goût du sens critique et de l’émancipation citoyenne. Pour cela, seuls des groupes réduits d’élèves permettent un échange oral pertinent et construisent une pensée citoyenne.
- Quatrième critère : la réduction des inégalités sociales avec une généralisation de la mixité et avec une réelle mise en œuvre matérielle et humaine, pour un accueil satisfaisant de ceux qui ne vivent pas dans une norme ordinaire.
- Enfin, l’originalité et la poésie libératrices : une pédagogie différente, repensée par les acteurs éducatifs, qui soit décentrée du tandem maths/français pour une société prochaine que les élèves auront à charge de reconstruire, en réalisant un un énorme pas de côté .
Mais, assurément, ainsi que nous l’a rappelé une énième ministre de l’ Éducation Nationale, dont le passé se caractérise par la gestion d’un cabinet de conseils de manipulation du petit personnel des maisons bourgeoises de Singapour, « la baisse des effectifs des élèves est importante ». Et Depuis des décennies, les gestionnaires calculent une moyenne...
Pourtant, malgré la baisse départementale des cohortes d’élèves, nous n’avons pas encore atteint la moyenne de l’ OCDE de 21 élèves par classe pour le primaire et de 23 élèves pour le secondaire.
Et qu’en est-il de l’accueil des élèves les plus fragiles de notre département ?
- Le dispositif des UPE2A, comme chaque année, dans le primaire et le secondaire, ne parvient pas à assurer son quota légal d’heures allouées aux EANA.
La situation du dispositif UPE2A du collège Centre de Gap compte déjà 25 élèves cette année. Il se trouve surchargé si l’on considère la diversité des parcours tragiques des jeunes nouvellement arrivés en France et lorsque l’on sait que 2 tiers des élèves qui composent le dispositif n’avaient jamais été scolarisés avant. - Le quota de plusieurs SEGPA et ULIS déborde et va au-delà de 12 élèves, parfois jusqu’à 17.
- La plupart des élèves dans le champ du handicap bénéficient seulement de 3 heures de suivi par semaine avec une AESH, ce qui est infime en comparaison de leur difficulté.
- Un certain nombre de professeurs malades n’ont pas été remplacés durant plusieurs semaines dans plusieurs collèges. A tel point qu’il y a eu parfois la nécessité de faire appel à un professeur des écoles à la retraite.
- - Le non remplacement des professeurs malades, des AESH, des AED, de plusieurs psychologues scolaires ou de plusieurs enseignants spécialisés des RASED impacte les conditions de travail de tous les agents de la fonction publique ainsi que le suivi des élèves.
- - L’élargissement progressif de l’amplitude d’intervention des AESH, dont certain.es se partagent plusieurs établissements et peuvent être redéployées sur plusieurs PIALS, prive les élèves les plus fragiles d’une aide stable. De plus, Il n’aura échappé à personne que la plupart des AESH sont des femmes dont les salaires ridiculement bas et la proposition de formation ne progressent pas beaucoup. Ces AESH sont pourtant indispensables au fonctionnement de l’école inclusive. Malgré cela, rien n’est pensé pour alléger leur quotidien. La dernière aberration managériale de cette année a été de leur imposer de récupérer les heures supplémentaires réalisées auprès d’un élève dans le cadre d’une sortie, obligatoirement la même semaine que la sortie.
- - Les AED ( Assistant.es d’éducation) se retrouvent eux et elles aussi face à des situations de plus en plus complexes avec parfois une pression appuyée de leur supérieur hiérarchique dans le cadre de leur travail. Dans certains établissements, la dégradation de leur condition de travail entraîne un « turnover » régulier. Le manque de considération a poussé certain.es à faire grève, malgré l’insécurité de leur emploi et leur salaire minuscule.
- - Les TZR sont confronté.es à des zones de remplacements très larges qui les poussent à couvrir plusieurs établissements très éloignés. A cette difficulté s’ajoute tout un tracas administratif pour le remboursement des frais kilométriques.
- - Les professeurs qui subissent des postes partagés dans plusieurs établissements se retrouvent eux aussi dans des situations organisationnelles épuisantes, alors que la solution serait d’utiliser leur quota d’heures dans le même établissement pour le profit de petits groupes d’élèves en nombre réduit.
Si l’on se réfère aux données du classement chiffrées PISA, le bilan récurrent scolaire révèle que l’école française n’obtient pas de bons résultats. Malgré cela, la valse instable des réformes imposées s’accentue. La désorganisation de tous les services de l’ Éducation Nationale crée la perte du cadre protecteur et la perte du sens.
Les rouages détraqués de l’Éducation Nationale, avec la baisse constante des moyens financiers et humains, ne permettent pas de reconnaître ni de soutenir la souffrance d’un ou d’une élève ni de prendre en compte la fatigue des enseignant.es à qui l’ on refuse, de plus en plus des demandes de temps partiel et qui se voient infliger 3 jours de carence en cas de maladie. Dans cet engrenage de management toxique, n’oublions pas les agents cités précédemment, de plus en plus nombreux, employés dans des contrats précaires.
Notre institution politiquement déréglée nous entraîne vers la sensation oppressante du rouleau, que l’abstraction mathématiquement bleue ne parvient pas à effacer. Mais le pas de côté n’est pas encore entamé.
Au contraire, l’inquiétude grandit face aux résultats des élections d’une puissance « soit disant » régulatrice du monde. Et le désarroi s’amplifie face à un génocide qui se perpétue dans la complicité des gouvernements mondiaux.
On vous joins le compte rendu de cette réunion, dans le fichier ci-dessous.